Rachat du nucléaire de General Electric Steam Power par EDF : les médias nationaux comme franc-comtois en parlent, notamment à Belfort. La CFDT aussi !.

Publié le 17/01/2022

L’été dernier  le gouvernement annonçait la suspension du projet « Hercule » de restructuration du groupe EDF : pas d’accord global avec la Commission européenne , opposition des syndicats, etc.

Automne 2021 : sous la pression du gouvernement  le groupe EDF est en discussion pour racheter les activités nucléaires du GE Steam Power avec les fameuses  les turbines à vapeur Arabelle de  Belfort (ex-site Alstom racheté par GE en 2015).

Début 2022 : tout semble s’accélérer même si les mesures demandées à EDF pour amortir la hausse des prix de l’énergie perturbe le paysage.

Quelle analyse font nos syndicats CFDT EDF - CFDT General Electric Steam Power et CFDT Framatome du projet de rachat par EDF de l’activité nucléaire GE Steam Power ?

En ce début 2022 nos syndicats CFDT des entreprises concernées ont produit le 5 janvier une note intitulée « Analyse CFDT EDF - CFDT General Electric Steam Power et CFDT Framatome concernant le possible rachat par EDF de l’activité nucléaire GE Steam Power » dont nous extrayons de large extrait ci-après et que l’on pourra télécharger en intégralité ci-dessous.

 

Merci à l’Union Métaux CFDT Franche-Comté de nous avoir fait parvenir ce document qui concerne plusieurs de nos syndicats CFDT de la région et les salariés de leurs entreprises mais aussi tous les adhérents CFDT intéressés par les questions de mix énergétique.

 

Extraits de la note des syndicats CFDT EDF, GE Steam Power et Framatome:

……..

« Malgré les réticences initiales d’EDF, la volonté politique et l’enjeu de relance de la filière nucléaire via l’annonce de constructions de nouvelles capacités, ont donné un sens économique et stratégique à ce rachat qui ne devrait désormais plus tarder à aboutir. Il reste malgré tout de nombreuses interrogations autour de ce sensible et complexe dossier.

 

Les effectifs et les compétences

Les métiers GE de centrale nucléaire (turbine, alternateur, auxiliaires, …) sont caractérisés par des compétences pointues, nécessairement forgées dans l’expérience et la durée.

Pour EDF, il faut sécuriser les compétences en reprenant un périmètre large du point de vue des effectifs, et des activités périphériques complémentaires. Outre les emplois strictement dédiés au nucléaire, il y a des emplois mixtes et des thermiques purs. Les expertises des turbines conventionnelles sont facilement transférables vers celles nucléaires avec de la formation et de l’accompagnement.

La CFDT réaffirme qu’il faut absolument éviter un scénario « faillite AREVA » qui s’est traduit par une hémorragie de compétence par suite d’un plan de départs volontaires, pour ensuite constater un nécessaire réengagement d’embauches…

Le stop and go des embauches à GE, EDF, Framatome, dans la filière nucléaire en général, ça ne marche pas ! La troisième filière industrielle française mérite mieux qu’une GPEC girouette !

Coté CFDT GE, cela a été une des actions menées sur les activités de GE Steam Power afin de conserver à tout prix les compétences, en vue de sécuriser les projets dans la durée, réduire le nombre de suppressions d’emploi envisagées, et relancer des Observatoires Des Métiers (ODM) afin de pérenniser le savoir et les compétences.

Les discussions engagées à tous les niveaux par la CFDT consistent à ne pas se limiter à une approche simpliste de découpage entre activités nucléaires et non nucléaires sur les compétences existantes, qui sont ou seront nécessaires à l’exécution de grands projets comme EPR2, mais aussi à l’export sur les projets avec Rosatom* ou en Inde, sans oublier la part d’activité des services. En conséquence, une attention particulière est à porter sur les équipes d’intégration EDF et GE afin de gérer au mieux l’adaptation des compétences de chaque entreprise.

Il est nécessaire pour les salariés de GE qui seraient concernés par la vente, de voir très rapidement un cap stratégique clair et motivant après les péripéties vécues depuis 6 ans, à savoir la reprise d’ALSTOM Power par GE, suivi d’un Plan se Sauvegarde de l'Emploi (PSE) en 2016, d’une réorganisation, d’une rupture conventionnelle collective en 2019, d’un plan sénior en 2019, d’un PSE en 2021 doublé d’une réorganisation.

Cette nécessaire motivation passe par le maintien des compétences et donc un renouvellement des effectifs au regard de la pyramide des âges. Mais cela passe aussi par des investissements importants dans des outils efficaces (remplacement de machines en usine pour limiter les pannes,modernisation ou adaptation des outils logiciels, simplification de processus) au regard des défis de l’EPR2 notamment.

De même, pour les salariés non concernés par le rachat, il est important d’obtenir des garanties sur l’avenir par un cap stratégique clair, pour permettre une pérennité des activités restantes sur laquelle le périmètre vendu s’appuiera dans le cadre des interdépendances industrielles. Dans ce dossier, l’Etat Français, qui veille au bon déroulement de cette vente, a lui aussi sa part de responsabilité en termes de réussite industrielle et d’emplois.

 

Les revenus des diverses activités (services et nouveaux projets)

L’activité Services est la part la plus rentable et bénéficie d’une dynamique plus réactive que les projets neufs. La reprise post Covid est visible pour tous les marchés de l’énergie (fossile et nucléaire). Malgré la COP26, de nombreux pays ne peuvent compter que sur leur base fossile (charbon, biomasse et gaz) car les projets de centrales moins émettrices de CO2 demandent du temps et ont été retardés par la crise sanitaire.

L’activité nucléaire des projets neufs reste conditionnée à du volontarisme politique, particulièrement en France et en Europe. Les annonces récentes laissent augurer une activité importante pour les EPR2 mais restent suspendues aux prochaines élections présidentielles.

………………………………..

Les périmètres repris et l’ancrage chez EDF

Durant les différentes discussions déjà engagées au sein des entreprises, un périmètre semble se dégager, même s’il reste encore à confirmer par les engagements des parties concernées. Ces activités s’entendent au sens large (études-fabrication-services associés) et sont identifiées :

  • Turbine vapeur et auxiliaires,
  • Alternateur et auxiliaires,
  • Echangeurs,
  • Pompes à différents niveaux,
  • Contrôle Commande de l’ensemble des parties ci-dessus,
  • SMR (Small Modular Reactor ou PRM [NDLR  petits réacteurs nucléaires ] en Francais).

La R & D ( NDLR Recherche et développement) pourtant nécessaire à la viabilité du périmètre n’est pas citée. (C’est une compétence transverse et centralisée dans GE)

Cette approche pourrait correspondre à la vision de la CFDT pour peu que l’ensemble des compétences de ces activités soient reprises dans leur ensemble afin de garantir le maintien des compétences et la bonne exécution des projets.

Selon l’ancrage dans EDF, les relations avec les autres activités de GE et les autres clients pourraient évoluer. Il est donc crucial de définir un modèle qui permette de préserver l’activité de Steam Power pour maintenir l’équilibre financier.

Diverses options semblent se dégager :

  • Activité reprise au sein du groupe EDF, devenant une nouvelle filiale détenue à 100% ou alors ancrée sur la filiale Framatome, devenant alors un établissement supplémentaire au sein de Framatome.
  • Une entité autonome type pool d’investisseurs mais détenue majoritairement par EDF.
  • Une dernière option proposant une répartition des activités reprises entre EDF et Framatome parait peu viable car elle casserait la cohérence de l’activité actuelle tant les liens entre les activités de services et les nouveaux projets sont nombreux et réguliers.

TURBINE A GAZ GE 001 HOR

Dans tous les cas, il faudra conserver la possibilité de travailler dans la confiance  avec des clients pouvant parfois aussi être concurrents comme Rosatom*.

 

 

 

Pour la CFDT des questions restent ouvertes

  • En effet, des activités de pointe sont présentes chez GE Steam Power sur les supraconducteurs. GE (Alstom historiquement) a utilisé ces compétences dans les domaines de la recherche fondamentale et la médecine, plus récemment dans les éoliennes de forte puissance. GE acceptera-t-elle de laisser partir cette activité nécessaire à sa branche Renewable ? (NDLR énergie renouvelable)
  • Les produits de contrôle commande sont issus de la Branche GAS de GE (NDLR : division de General electric  GE power produisant notamment des turbines à gaz)  et ne correspondent pas forcément aux critères exigés dans le nucléaire. Un nouveau développement du Contrôle commande doit-il être lancé ou des produits ex-ALSTOM doivent-ils être relancés ?
  • L’activité naissante des SMR constitue un secteur d’avenir selon de nombreux spécialistes. Un projet français existe via NuWard et un autre NuScale aux USA. GE via sa filiale GE Hitachi est partie prenante du projet américain mais des équipes françaises sont déjà impliquées dont Framatome. GE Steam travaille déjà sur ces projets sans compter celui soutenu par Rolls-Royce au Royaume-Uni. Dans tous les cas, des relations et transactions commerciales devront être maintenues avec GE durant une période déterminée afin que chacun puisse adresser son marché.

La CFDT tient à rappeler que cette opération ne se limite pas à une simple reprise d’activités et effectifs limités à la France. Elle concerne l’ensemble des activités et effectifs implantés dans lemonde entier. Des sites GE hors France ont déjà été jugés stratégiques pour la cohérence de l’activité :

  • Rugby (Royaume Uni) dans le cadre du support au projet HPC et Sizewell C à venir (NDLR tranche C du projet Hincley Point au sud-ouest de l'Angleterre et tranche C du site de Sizewell au sud est dans le comté du Suffolk)
  • Sanand (Inde) : cette usine donne un point d’entrée au potentiel marché nucléaire indien sans compter sa compétitivité pour fabriquer des composants de turbine à faible valeur ajoutée en complément du site de Belfort."

 

 * ROSATOM : entreprise publique russe du nucléaire

La note à télécharger en intégralité ci-dessous

On trouvera également des liens vers d'anciens articles sur GE Belfort.